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Au bénéfice du doute

Aimables lecteurs. Ils ont tout admis sans grogner ou presque. le choix de nouveaux actionnaires, en juin 2010, puis la recapitalisation du groupe cinq mois plus tard. La révocation du directeur, le 15 décembre 2010, est certes moins bien passée mais la nomination de son successeur, approuvée par le personnel, le 10 février, a mis du baume sur la plaie.

Le Monde | 19.02.2011 à 13h46 • Mis à jour le 19.02.2011 à 13h46

Aimables lecteurs. Ils ont tout admis sans grogner ou presque. le choix de nouveaux actionnaires, en juin 2010, puis la recapitalisation du groupe cinq mois plus tard. La révocation du directeur, le 15 décembre 2010, est certes moins bien passée mais la nomination de son successeur, approuvée par le personnel, le 10 février, a mis du baume sur la plaie.

Il ne faudrait pourtant pas surestimer leur confiance - ni leur fidélité. La plupart des réactions au premier éditorial d'Erik Izraelewicz, le 12 février - suivant l'"Au revoir" d'Eric Fottorino, la veille - demeurent bienveillantes, mais elles traduisent aussi une inquiétude croissante. "A suivre. mais au bénéfice du doute ", écrit, par exemple, Raymond Thiebaut (Wattignies, Nord), résumant le ton général des nombreux messages adressés au courrier ou postés sur l'édition en ligne.

Cette circonspection s'exprime, plus ou moins clairement, depuis deux mois. Souvent, il ne s'agit que d'une ou deux lignes glissées à la fin d'un texte. "Je forme desvoeux pour que Le Monde se sorte de ses difficultés financières et perdure tel qu'il est". note Clarisse Vallette (Perpignan ). "Il n'est pas question pour moi de remettre en cause l'appréciation générale de la qualité rédactionnelle de votre titre. mais je tenais à vous faire part de ma confiance un tantinet ébranlée". conclut Jean-François Evrard (Bry-sur-Marne, Val-de-Marne).

"Merci à tous pour l'énorme effort de qualité opéré. Défendez notre droit à une information libre et honnête. Cette nouvelle étape est, plus que les précédentes, source de nos attentes". remarque Jean Borel (Saint-Etienne). "Je souhaite à la nouvelle équipe de continuer à nous informer avec le même esprit d'indépendance et d'humanité qui fait mon attachement au Monde ". ajoute Anne Fradin (Lyon ).

D'autres sont plus prolixes - et plus mordants. "Avec de tels propriétaires, comment préserverez-vous l'objectivité pendant l'année électorale 2012. (. ) N'avez-vous pas vendu votre âme pour un gros plat de lentilles, comme le dit la Bible ?", demande Patrick Poissonnier (Amiens ).

"Je suis mal à l'aise depuis que Le Monde n'est plus indépendant financièrement. Les trois actionnaires ont eu beau jurer qu'ils n'interviendraient pas, une suite d'événements indique qu'il y a lieu de tout craindre. C'est d'abord Eric Fottorino, congédié brutalement sans aucune explication. C'est maintenant le choix d'Erik Izraelewicz, dont le rôle qu'il a joué aux Echos et à La Tribune amène à se demander si son orientation correspond à la ligne éditoriale du Monde. On ne me fera pas croire qu'il n'y a pas, dans la rédaction, de journalistes capables de devenir directeur/trice du journal", s'inquiète François Theuriot (Brest ), qui signe. "En espérant pouvoir continuer de compter parmi vos lecteurs. Mais ça me paraît mal engagé. "

Daniel Gall (Chatou, Yvelines) adopte le mode ironique. "J'attends avec impatience la contre-enquête sur les pratiques commerciales de Free. le financement de la campagne de Ségolène Royal, les enquêtes sur les banques d'investissement comme la banque Lazard - et la rémunération de ses dirigeants. Je suis sûr que les journalistes du Monde pourront écrire absolument tout ce qu'ils veulent!"

Nombre de lecteurs profitent de l'occasion pour exposer leurs griefs - et leurs solutions. Premier défi. la distribution. "Vous avez un sacré travail sur la planche pour faire du Monde un journal d'information, accrochés que vous êtes au journal du soir fait pour les grandes agglomérations qui le reçoivent le jour même. Celui sorti le samedi. me parvient par la poste le lundi. Que ses nouvelles sont fraîches. déplore François Parot (La Rochelle ), en suggérant. Continuez à sortir comme d'habitude pour distribution immédiate et envoyez-nous une "dernière" ajustée au dernier moment qui ne soit pas ridicule."

Michel Blanchard (Paris ) va dans le même sens. "Il faut revoir votre processusde bouclage et de diffusion, j'en suis désolé". estime-t-il en déplorant le "ratage" du départ de Moubarak, pendant le week-end des 12-13 février - ledit "ratage" était de fait imparable, compte tenu des horaires de bouclage.

Pour autant l'idée, à l'étude, de modifier l'heure de parution en passant du soir au matin, provoque, a priori, des réticences. "Le Monde est un journal du soir. S'il perd ce créneau horaire dans l'édition nationale, il est mort (. ). Rien de tel qu'une petite lecture du Monde, avant de trouver le sommeil (lirela chose de façon très positive)". observe Jean Arribehaute (Paris).

"Je regretterais énormément le changement d'horaire. Nombre de Franciliens sont extrêmement sensibles au plaisir de pouvoir acheter en primeur leur journal de fin de journée et d'avoir ainsi le temps de le lire tranquillement, chez eux, le soir, avant le rush de tous les autres journaux, le lendemain matin". ajoute Dominique Biton (courriel).

Autre sujet sensible, l'offre de fin de semaine. "Si le besoin du supplément de fin de semaine est réel (ce dont je doute), pourquoi ne pas en faire une réelle ouverture sur le monde (le vrai), et nous faire découvrir ce que sont les mêmes types de préoccupations vus depuis les autres pays ?". propose Roger Woehrlé (Lyon), en regrettant, comme beaucoup, le "surcoût imposé" du magazine.

Certains lecteurs, enfin, sensibles au message d'Erik Izraelewicz ("Le Monde change pour rester fidèle à lui-même"), nous encouragent, non sans réserves. "Laissez la chance au changement, les évolutions sont indispensables. Peut-être aurai-je eu tort de faire confiance mais, lecteur depuis longtemps, je ne me satisfais plus du ronronnement". estime Claude Rubin (Neuilly-sur-Seine).

Antoine Blanc (Port-au-Prince, Haïti ), lui aussi, positive. "J'ai décidé de faire crédit à la nouvelle direction (même si les actionnaires ne me rassurent pas). Le mot magique, que j'espère voir honoré quotidiennement par chaque journaliste, est en effet. "honnêteté". Tenez bon, la vérité est partout, les erreurs aussi, considérez vos lecteurs comme des adultes."

Les optimistes sont, malheureusement, moins nombreux que ceux qui signent "un abonné en sursis". A la rédaction de tous les rassurer. Vite.